Incahuasi ou l'île aux trésors...
En ce jeudi après-midi, nous nous convaincons une fois de plus que l'aventure est au coin de la rue... Nous préparons donc nos fières goélettes la Niña (Olivia) et la Pinta (du francais pinte, confiée à Pierre) pour un voyage vers l'ouest, à la recherche d'un passage vers une île perdue pleine de richesses. Demain, ce sera donc vendredi, et la vie sauvage des grandes traversées...
Sentant l'appel du large, nous prenons à droite au coin de la rue... Après 30 lieues dans un estuaire sablonneux, nous approchons de la grande mer blanche et salée d'Uyuni. Rares sont les navigateurs ayant tenté de naviguer plein ouest sur de frêles goélettes d'à peine 3 ou 4 tonneaux (de bière, de viande séchée et de polenta...). La navigation est réputée dangeureuse et l'orientation difficile : aucun point de repère sur cette immensité blanche, des boussoles déboussolées par la concentration en plomb et lithium (1/3 des réserves de la planète) de la mer, des sextans inexploitables en plein jour sur ce grand miroir immaculé...
Faisant confiance à notre instinct et aux découvertes des Anciens (elle est ronde !) nous nous engageons sans crainte vers l'inconnue. D'après nos calculs nous devrions croiser Incahuasi (l'île du pecheur) après 5 heures de navigation. A plusieurs reprises Olivia, du haut de sa vigilence, annonce la terre ferme, tantot à tribord, tantot à babord... Que nenni ! Ce ne sont que mirages et illusions pour nous perdre. Mais nous gardons le cap... Et nous faisons bien ! Après 5h30 l'île apparait enfin, face à nous. Minuscule (comparable à l'île de la cité) au milieu de cette étendue blanche et plate de 12 000 km2 (superficie de l'île de France)...
Lorsque nous abordons, nous tombons nez à nez avec de gentils habitants qui nous offrent le gîte. Ils nous paraissent aimables, serviables voire chaleureux une fois partagée un peu de la bière que nous apportons. Par un heureux hasard nous constatons qu'ils parlent la langue du royaume de Castille qu'Olivia connait pour avoir voyagé autrefois dans ces contrées. En son honneur et parce qu'elle appercut l'île la permière, nous appelons nos nouveaux amis, habitants de l'île Incahuasi : Boliviens.
Nous profitons d'un coucher de soleil magnifique et engloutissons goulument soupe, polenta et biscuits. Nous remettons au lendemain l'exploration de l'île et la recherche de ses trésors. A notre réveil, nous en faisons le tour, gravissons jusqu'à son point le plus haut. Point de trésor mais des cactus millénaires par milliers...
Où est l'Eden promis ? Pas d'eau, des températures largement négatives la nuit, pas la moindre trace d'or ou d'argent... Après plusieurs heures à courrir l'île nous nous faisons une raison. Mais nous rappelant nos poésie de CM2, nous nous remémorons soudain ce bon vieu laboureur qui disait à ses enfants :
"Pédalez, prenez du plaisir
C'est la forme qui manque le moins."
Nous n'oublierons jamais ces deux jours à pédaler sur le salar, le sentiment de liberté unique éprouvé, l'horizon sans limite...
Et de conclure : "le voyage est un trésor..."